BADER Hanifa
Impact des haies sur les temps de transfert de l’eau en versant : Suivi géophysique haute fréquence et modélisation hydrogéophysique.
Encadrants : Jean Marçais (INRAE, RiverLy), Rémi Clément (INRAE, REVERSAAL), Nadia Carluer (INRAE, RiverLy), Laurent Lassabatère (ENTPE, LEHNA)
Ecole Doctorale : ED de chimie de Lyon

Le Pacte pour la haie de 2023 vise à planter 50 000 km de haies en France d'ici 2030, soulignant leur rôle multifonctionnel. En particulier, les haies, composées de plantes ligneuses et arbustives, peuvent augmenter l'infiltration et réduire le ruissellement, modifiant l’hydrologie des versants. Bien que leur rôle sur les écoulements de surface soit bien documenté, leur impact sur les processus hydrologiques en profondeur (percolation, recharge, reprise évaporatoire) reste largement inexploré, notamment pour les compartiments profonds de la zone critique (zone vadose, nappe phréatique). Ces questions prennent une importance particulière dans le contexte de changements climatiques, quit perturbent les  dynamiques hydrologiques. Les haies influencent également les transferts de contaminants, tels que les pesticides, sans que l’on sache si cet effet est bénéfique (infiltration favorisée et taux de matière organique favorisant la rétention des contaminants) ou défavorable (accélération des transferts par la macroporosité induite par le réseau racinaire). Distinguer l’importance relative de ces processus est clef pour quantifier l’impact de ces structures paysagères sur les aspects quantitatifs et qualitatifs de la ressource en eau en milieu agricole, en fonction de leur contexte agropédoclimatique d’implantation.

Cette thèse vise à quantifier l’impact des haies sur la dynamique des écoulements hydrologiques à différentes échelles spatiales et temporelles : de l’échelle locale, autour de la haie, jusqu’à celle du versant, et de l’événementiel au saisonnier ou annuel. Pour cela, une approche combinant observations sur le terrain et modélisation numérique hydrologique est mise en oeuvre. L’observation repose principalement sur la Tomographie de Résistivité Électrique (TER), installée sous une haie, réalisée en continu avec le résistivimètre OhmPi développé par Clément et al. (2020) à REVERSAAL, INRAE (Figure 1).

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Figure 2 : Saturations extraites d'Hydrus à t = 0 h et t = 332 h durant une précipitation. © Hanifa Bader
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Figure 3 : Différences relatives de résistivité inversée à t = 0 h et t = 332 h pour le même événement. © Hanifa Bader
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Figure 1 : Installation des électrodes et de l'OhmPi à Pollionnay. © Hanifa Bader

Cette méthode permet d’obtenir une image détaillée de l’évolution naturelle de l’humidité dans le profil de sol et la zone racinaire à différentes profondeurs. Des sondes FDR (Frequency Domain Reflectometry) mesurent également en continu l’humidité et la température du sol, offrant des données complémentaires. Une optimisation du déclenchement des mesures TER, permise par le système OhmPi. Il s’agit de relier les données acquises sur le site (humidité et précipitations) pour ajuster automatiquement la fréquence des acquisitions, permettant ainsi de capturer les variations hydrologiques rapides pertinentes en fonction des conditions environnementales sans multiplier inutilement les séquences d’acquisition.
D’autre part la modélisation hydrologique permet d’identifier les processus à l’origine des observations et notamment de l’évolution temporelle de la teneur en eau (Figure 2) dans le sol et de faire le lien avec la variation observée de résistivité électrique (Figure 3), pour mieux comprendre l’influence de la haie sur les écoulements, et quantifier les flux correspondants (infiltration et évapotranspiration). Le terrain d’étude est une haie située sur le bassin versant de l’Yzeron (sous bassin du Mercier), en région lyonnaise.

La méthodologie s’articule autour de trois étapes principales :

  • 1. Étude de l’infiltration lors d’un événement pluvieux : L’objectif est d’analyser comment les haies influencent l’infiltration profonde lors d’événements pluvieux, en étudiant les compartiments mobilisés (matrice poreuse, macropores, bioturbation) et leurs effets sur les temps de transfert. Cette approche s’inspire des résultats d’études précédentes, notamment celle menée par (Kowalski 2020), qui a suivi les flux d’eau sous une haie à l’aide d’un traceur, à court terme en conditions d’infiltrations forcées.
  • 2. Analyse approfondie de l’infiltration et de l’évapotranspiration à l’échelle saisonnière : Cette phase intégrera les dynamiques après la pluie, en quantifiant la recharge et l’évapotranspiration sous la haie au fil du temps. Elle apportera des réponses sur l’influence des haies pendant les périodes sèches, lorsque l’évapotranspiration joue un rôle dominant.
  • 3. Dynamique saisonnière à l’échelle du versant : L’analyse sera élargie à l’échelle du versant pour étudier l’impact des chroniques météorologiques sur les flux hydrologiques. Les simulations intégreront les résultats des étapes précédentes pour quantifier le partitionnement des flux (recharge, évapotranspiration, écoulements latéraux) dans un paysage intégrant des haies, sous diverses conditions climatiques.

Les résultats attendus de cette thèse permettront de mieux comprendre l’impact des haies sur la régulation des flux d'eau, tant à l’échelle locale qu'à l’échelle du versant, en tenant compte des effets saisonniers et des changements climatiques. Ces connaissances devraient contribuer à améliorer la gestion des haies dans les paysages agricoles et à renforcer leur rôle dans la préservation de la qualité de l’eau et la gestion des contaminants.

Financement :

  • 50% H2O’Lyon, Université de Lyon
  • 50% Département AQUA, INRAE

Références :

  • Clement, Rémi, Yannick Fargier, Vivien Dubois, Julien Gance, Emile Gros, and Nicolas Forquet. 2020. “OhmPi: An Open Source Data Logger for Dedicated Applications of Electrical Resistivity Imaging at the Small and Laboratory Scale.” HardwareX 8: e00122. doi:10.1016/j.ohx.2020.e00122.
  • Kowalski, Elia. 2020. Etude de l’influence des haies et talus sur les transferts de contaminants réactifs : apport de la géophysique. INRAE: INRAE.