CLAVEAU Maeva
2023 - 2026
Traçage géochimique des sources de sédiments à l’échelle du bassin versant de la Saône : atouts et limites de l’échantillonnage intégratif des matières en suspensions
Encadrants : Aymeric Dabrin et Matthieu Masson (UR RiverLy, équipe LAMA)
Ecole Doctorale: ED206, Chimie, Environnement, Procédés, Université de Lyon

Mots clés

Piège à particule, matières en suspension, métaux, conservativité, Saône, traçage géochimique, matière organique

Résumé

La Saône prend sa source dans les Vosges et se jette, après 480 km, dans le Rhône à Lyon. Son réseau hydrographique de 9 000 km draine une surface d’environ 30 000 km², soit un tiers du bassin du Rhône. A Lyon, confluence du Rhône et de la Saône, cette dernière représente 58% du débit liquide et 37% du flux des matières en suspension (MES) 1. Bien que ces particules soient indispensables aux écosystèmes aquatiques en contrôlant le transport des nutriments, des éléments essentiels et de la matière organique, elles représentent aussi un vecteur pour les contaminants2–4. A l’échelle du bassin versant du Rhône, la Saône représente le deuxième affluent (après le Gier) pour lequel les particules sont les plus contaminées pour un large panel de substances5. Afin d'identifier les sources de ces polluants, il est essentiel de déterminer l'origine des MES transportées par la Saône. À cette fin, les approches de « fingerprinting », ou méthode de traçage, ont connu un développement significatif au cours des quatre dernières décennies6. Récemment, une méthode d’analyse permettant d’utiliser les traceurs dans la fraction non-réactive a été proposée afin d’utiliser des propriétés conservatives3. En les intégrant dans un modèle de mélange, les concentrations en élément traces/majeurs sont utilisées en tant que traceurs pour estimer les contributions relatives des différentes sources potentielles de MES.

Afin d’obtenir une quantité suffisante de MES pour l’analyse des différentes substances/traceurs ciblés (> 5 g de poids sec), les pièges à particules (PAP) (FIGURE 1-A) représentent une alternative pertinente pour le prélèvement des MES. Ces outils, permettent en outre d’obtenir un échantillon intégratif sur la période échantillonnée (une semaine à un mois, typiquement) et peuvent être aisément déployés à une très large échelle spatiale7,8. Cependant, il a été montré que les concentrations totales en éléments traces et majeurs dans les MES collectées par PAP pouvaient montrer des biais par rapport à un prélèvement de référence9 (FIGURES 1-B ET 2). On peut alors émettre l’hypothèse de la mise en place de processus de dégradation de la matière organique à l’intérieur du piège, suggérant le relargage de traceurs associés à certaines phases porteuses.
Dans ce contexte, deux principaux enjeux liés à l’échantillonnage par PAP ont été identifiés : Est-t-il possible d’identifier et de quantifier les processus de dégradation qui se mettent en place à l’intérieur du piège ? Est-ce que la méthode de traçage basée sur la phase réfractaire permet de s'affranchir de la non-conservativité de certains éléments métalliques traces/majeurs dans les MES prélevées par PAP?

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Figure 2. Moyennes des concentrations en COP et en métaux dasn les MES prélevées par piège et manuellement par centrifugation © Masson et al., 2021
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Figure 1. Méthodes d'échantillonnage des MES ; A : échantillonnage intégratif par piège à particules ; B : échantillonnage ponctuel par décantation de gros volumes d'eau (référence)

 

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Figure 3. Bassin versant de la Saône ; En vert : les stations d’étude

 

 

 

 

 

 

Pour se faire cette thèse s’appuiera d’une part sur la mise en place de campagnes d’échantillonnage des MES de la Saône à Lyon et de ses principaux affluents (FIGURE 3) et d’autre part sur la mise en place d’expérimentations en conditions contrôlées de laboratoire afin d’identifier et quantifier les processus responsables d’une sous-estimation des concentrations de certains métaux dans les MES collectées dans le piège. Les données de concentrations en éléments trace/majeurs permettront d’alimenter un modèle de traçage géochimique pour estimer les contributions relatives des sources de sédiments à l’échelle du bassin versant de la Saône. Ce suivi d’au moins un an permettra également de prendre en considération différents facteurs tels que la teneur en matière organique, la saisonnalité ou la durée de déploiement du piège. La mise en place d’un dispositif expérimental visera à suivre la dynamique temporelle (cinétique de dégradation) des concentrations en métaux dans les différentes phases porteuses (extractions séquentielles). Ces approches permettront de comprendre les mécanismes responsables du biais potentiel des concentrations métalliques dans les MES prélevées par PAP, pour ensuite évaluer la robustesse de la méthode de traçage basée sur la phase réfractaire, en vue de tracer l'origine des MES à l’échelle d’un système fluvial comme celui de la Saône, et proposer une méthode généralisable à d’autres systèmes fluviaux.

 

Financement

Projet CONTASAONE (Agence de l’eau RMC et FEDER)

Références

  • 1.    Launay, M. L. Flux de matières en suspension, de mercure et de PCB particulaires dans le Rhône, du Léman à la Méditerranée. (Université Claude Bernard - Lyon I, 2014).
  • 2.    Eisma, D. Suspended Matter in the Aquatic Environment. (Springer Science & Business Media, 2012).
  • 3.    Begorre, C. Origine des matières en suspension et des sédiments déposés dans le bassin versant du Rhône : historique des apports et réactivité des traceurs. (Université de Lyon, 2021). doi:10/document.
  • 4.    Delile, H. et al. Legacy-micropollutant contamination levels in major river basins based on findings from the Rhône Sediment Observatory. Hydrol. Process. 36, e14511 (2022).
  • 5.    Delile, H. et al. Hydro-climatic drivers of land-based organic and inorganic particulate micropollutant fluxes: The regime of the largest river water inflow of the Mediterranean Sea. Water Res. 185, 116067 (2020).
  • 6.    Collins, A. L. & Walling, D. E. Selecting fingerprint properties for discriminating potential suspended sediment sources in river basins. J. Hydrol. 261, 218–244 (2002).
  • 7.    Lardy-Fontan, S., Guigues, N., Dabrin, A. & Masson, M. Les pièges a particules: principes, Etat de l’art et perspectives pour la surveillance des milieux aquatiques - focus sur les cours d’eaux. Rapp. AQUAREF 35 (2016).
  • 8.    Harhash, M. et al. Efficiency of five samplers to trap suspended particulate matter and microplastic particles of different sizes. Chemosphere 338, 139479 (2023).
  • 9.    Dabrin, A., Masson, M., Le-Bescond, C. & Coquery, M. Représentativité des matières en suspension échantillonnées par les pièges à particules dans les cours d’eau. (2019).